La Neuvelle-lès-Lure (Haute-Saône)

1. Localisation et emprise connue de l’occupation

 

La-Neuvelle-lès-Lure est situé au nord du territoire séquane, entre Luxeuil-les-Bains au nord-ouest, distant de moins de 20 km, et Mandeure établi à un plus de 35 km au sud-est. Nous sommes à l’extrémité nord de la vallée de l’Ognon, rivière qui termine sa course à une vingtaine de kilomètres de là. Cette zone est caractérisée par un maillage de voies secondaires qui assurent la liaison entre deux branches de la voie du Rhin relativement éloignées, passant respectivement au nord par Langres et au sud par Besançon.

Les données archéologiques disponibles pour la commune sont modestes.  Nous ne disposons d’aucun indice d’occupation préhistorique et protohistorique. Pour la période gallo-romaine, il s’agit principalement de la voie qui franchit l’Ognon au niveau du bourg actuel et de quelques découvertes fortuites. La période alto-médiévale reste quant à elle muette.

 

2. Cadre naturel

 

2.1. Topographie, Géologie

 

La-Neuvelle-lès-Lure est implanté dans la dépression sous-vosgienne, en bout de course du bassin alluvial de la vallée de l’Ognon. Ce petit bassin bordé par la forêt se heurte aux premiers contreforts des Vosges. La topographie calme, dont l’altitude varie entre 300 et 336 m, favorise les activités agricoles. Tout juste constate-t-on une légère élévation en rive ouest de l’Ognon.

 

La géologie locale est marquée par les alluvions récentes de l’Ognon avec plusieurs zones d’alluvions anciennes dans la partie sud de la commune, à l’endroit où l’aérodrome est installé. La carte géologique indique quelques formations de grès bigarrés de part et d’autre de l’Ognon au sud mais, globalement, le sol environnant est caractérisé comme une succession de formations glaciaires et fluvio-glaciaires indifférenciées (Pleistocène).

 

2.2. Hydrographie

 

L’Ognon traverse la commune selon un axe nord – sud et se manifeste au travers de plusieurs méandres très prononcés.

 

3. Etat de connaissances

 

3.1. Sources

 

La relative indigence de découvertes archéologiques sur le territoire communal va de pair avec une documentation assez peu prolixe. La-Neuvelle-lès-Lure figure dans la synthèse générale à propos des vestiges de Haute-Saône rédigée par C. Longchamp (Longchamp 1860 : 34-35), puis par F. Poly sur les voies (Poly 1897 : 15-16) ainsi que dans le « dictionnaire » de L. Suchaux (Suchaux 1866, tome II : 113).

 

3.2. Historique des recherches

 

Les recherches anciennes sont nos principales sources d’information au regard des données archéologiques. Il s’agit de compilations qui regroupent les découvertes fortuites et les connaissances locales à propos du réseau viaire.

Sur le terrain, on ne connait aucune campagne de prospection au sol ou aérienne ayant donné des résultats positifs. Toutefois, le Service Régional de l’Archéologie a consigné un témoignage oral relatif à l’installation de l’aérodrome, au sud-ouest duquel un terrain aurait livré des concentrations notables de terres cuites architecturales. H. Walter a également intégré dans sa monographie les stèles funéraires extraites du cours de l’Ognon (Walter 1974 : 128-129).

 

4. Organisation spatiale

 

4.1. Voirie

 

La voie antique qui traverse Malbouhans, La-Neuvelle-lès-Lure, puis Saint-Germain en direction de Luxeuil-les-Bains est connue au moins depuis le XVIIIe siècle. Elle apparait d’ailleurs sur l’Atlas Dieu (Dieu 1858) et est décrite par les principaux auteurs que nous avons énumérés dans les sources. La notice de C. Longchamp est sur ce point plus précise car il signale qu’un habitant lui a révélé qu’on en remarque le passage au lieu-dit les Charmes [UD 1]. Un détail qui n’est pas forcément cohérent avec le tracé rectiligne de la « voie romaine » dressé sur l’Atlas Dieu, qui se contente de reprendre l’emprise de la voie moderne à cet endroit. Le cadastre napoléonien indique bien une « voie de Luxeuil », la rue de la Charme actuelle, qui traverse le lieu-dit avant de rejoindre l’axe principal. Le fait est d’autant plus intéressant que cette voie, d’une taille considérable, ne dessert aucune structure, tant sur le cadastre napoléonien que sur la carte d’état-major du XIXe siècle. Cette information nous semble plus fiable que celle de l’Atlas Dieu qui fonctionne à une tout autre échelle et tend à lisser les détails locaux au profit d’une trame générale continue simplifiée.

 

D’ailleurs, cette « voie de Luxeuil » aboutie au lieu de franchissement présumé de l’Ognon, situé à une centaine de mètres en amont du pont actuel [UD 2]. Pour C. Longchamp et L. Suchaux, la traversée était assurée par un pont dont on aurait retrouvé les vestiges (Longchamp 1860 : 35, Suchaux 1866, tome II : 113).

 

4.2. Le bâti

 

Le terrain décrit par les témoignages oraux, situé au sud – ouest de l’aérodrome à l’endroit où il jouxte le bois de la Collonge, correspond à l’ancien hameau de Vielle-Velle [UD 5]. On y aurait constaté la présence de concentrations notables de terres cuites architecturales « très anciennes et très fragmentées ». Aucun matériel complémentaire ne permet de corroborer l’identification d’une occupation antique.

 

4.3. Nécropole

 

Les deux stèles funéraires retrouvées dans le lit de l’Ognon [UD 4] ne sont connues que par des descriptions succinctes et par des dessins approximatifs (Longchamp 1860 : 35, Suchaux 1866, tome II : 113). Le premier monument aurait été sorti de l’eau vers 1848 puis abandonné sur la rive alors que le second serait encore immergé.

D’après L. Suchaux, tous deux proviendraient d’un endroit dénommé Li-fourneau en patois local (il ne s’agit pas du lieu-dit cadastral comme le sous-entend la carte archéologique) et situé à environ 1 km de la voie antique. Si on se fie à cette information, la seule localisation possible en restant sur le territoire communal correspond aux méandres de l’Ognon qui se déroulent vers le lieu-dit Pré la Dame. On constate d’ailleurs à cet endroit que le méandre le plus saillant ne formait pas encore une boucle sur la carte d’état-major du XIXe siècle.

 

4.4. Etendue supposée et remarques

 

En l’état actuel de la recherche, rien ne permet de présumer de la présence d’un habitat groupé en relation avec la voie sur cette zone de franchissement de l’Ognon. De plus, les rares indices archéologiques disponibles concernent des espaces éloignés de cet axe de circulation, tantôt au nord puis au sud de la commune. Quant au trésor monétaire que nous décrirons dans la partie dédiée à la chronologie, il n’offre pas un support pertinent pour s’interroger sur la dynamique du peuplement local.

 

5. Nature de l’occupation et pertinence des éléments de caractérisation

 

5.1. Artisanat

 

Aucune trace d’artisanat ancien n’est connue mais la stèle funéraire, dont il ne reste que des dessins frustes, semble représenter un artisan.

 

5.2. Habitat domestique

 

Nous ne disposons d’aucune information relative à la présence de structures d’habitat.

 

5.3. Vie religieuse

 

Nous ne disposons d’aucune information relative à la présence d’activités religieuses.

 

5.4. Installations publiques

 

Si on exclut le pont dont l’identification reste sujette à caution, nous ne disposons d’aucune information relative à la présence d’installations publiques.

 

6. Chronologie et critères de datation

 

6.1. La Tène

 

Nous n’avons aucun indice d’une occupation protohistorique.

 

6.2. Haut-Empire et Bas-Empire

 

Un trésor monétaire a été découvert à proximité du point de passage antique sur l’Ognon en 1855 [UD 3]. D’après L. Suchaux, la trouvaille aurait eu lieu à une centaine de mètres, dans un terrain « sablonneux et en pente, jadis boisé » (Suchaux 1866, tome II : 113) qui correspond sans doute à la pente qui dessert le lieu-dit la Corvée sur la rive ouest de la rivière.

Environ 80 monnaies d’argent de la première moitié du IIIe siècle auraient été exhumées à cette occasion, à l’effigie notamment de Héliogabale, Alexandre Sévère et Maximin. L. Lerat ajoute que le musée de Besançon conserve 30 monnaies en provenance de La-Neuvelle-lès-Lure, à l’effigie de Caracalla et Trébonien Galle, qui pourraient provenir de ce trésor (Lerat 1968 : 157).

 

6.3. Haut Moyen Age

 

Nous n’avons aucun indice d’une occupation alto-médiévale.

 

7. Synthèse sur la dynamique d’occupation

 

Malgré la présence d’une zone de franchissement de l’Ognon, vraisemblablement matérialisée par un pont, rien ne permet de présumer de la présence d’un habitat groupé, ni même d’habitats dispersés proches en relation avec la voie comme nous avons pu l’observer pour Brognard – Etupes dans un contexte assez similaire.

 

8. Perspectives de recherche

 

La topographie locale, où se succèdent cultures et pâturages dans un milieu assez ouvert au niveau de la voie, permettrait assez aisément des investigations complémentaires pour reprendre les termes des préconisations suggérées dans le rapport de 2014.

Pour aller plus loin, on pourrait même proposer de focaliser l’attention sur le lieu-dit les Charmes où les photographies aériennes laissent entrapercevoir quelques traces au sol.

 

9. Bibliographie

 

M.C.Arch.H.-S. = Mémoires de la Commission Archéologique de la Haute-Saône

RAE = Revue Archéologique de l’Est

S.A.L.S.A. = Société d’Agriculture, Lettres, Sciences et Arts de la Haute-Saône

 

Dieu H., 1858 : Atlas cantonal du département de la Haute-Saône dressé sous la direction de M. Dieu, préfet, par les agents-voyers du département, gravé par E.Schieble, Paris, imp. Lemercier, 1858, 29 cartes.

Lerat L., 1968 : « Les trésors de monnaies romaines en Franche- Comté », RAE, Besançon, Revue Archéologique de l’Est, p. 145-183 (volume 19).

Longchamp C., 1860 : « Découvertes et observations archéologiques faites dans la Haute-Saône de 1842 à 1860 », M.C.Arch.H.-S., Vesoul, Impr. L. Suchaux, p. 1-54 (t. II, 1ère livraison).

Poly F., 1897 : « La Haute-Saône sous la domination des Romains. 1ère partie: les voies romaines », Bull. S.A.L.S.A., Vesoul, A. Suchaux, p. 1-138. (3e série, numéro 28)

Suchaux L., 1866 : La Haute-Saône. Dictionnaire historique, topographique et statistique des communes du département, avec plans et dessins, Vesoul, impr. A. Suchaux, 2 vol., pl.

Walter H., 1974 : La sculpture funéraire gallo-romaine en Franche- Comté, Paris, Les Belles- Lettres, 184 p.

Damien Vurpillot

Illustrations La Neuvelle les Lure