Choisey (Jura)

1. Localisation et emprise connue de l’occupation

 

Sur le territoire communal de Choisey se développe une probable petite agglomération de bordure de voie repérée en 1997 lors d’un diagnostic avant l’aménagement du carrefour dit de Gevry, puis fouillé en 1998. Celle-ci se trouve alors à la charnière des communes de Choisey, Damparis et Gevry, face à l’actuel aéroport de Dole-Tavaux. Repérée et située sur le bord occidental de la voie d’Agrippa reliant Châlon-sur-Saône à Besançon, cette petite agglomération se développe entre le Ier et le IIIe siècle de notre ère, non loin de celle supposée à Dole. La commune de Choisey est implantée à la charnière du Finage et du Pays dolois, traversée par le Doubs et dominée par des collines qui forment l’extrémité méridionale du massif de la Serre. Le Finage possède une longue tradition de recherche archéologique puisque ce territoire a été très tôt propice à l’installation des Hommes. Dès la seconde moitié du XXe siècle, le développement de l’agglomération doloise et la mise en place d’un réseau autoroutier dense a entraîné le développement de l’archéologie préventive sur les territoires communaux de Choisey, Damparis ou encore de Tavaux. La multiplication des diagnostics et des fouilles ont ainsi permis la mise au jour d’un certain nombre d’occupations allant du mésolithique à la période moderne. C’est dans ce contexte que fut découverte la petite installation de bordure de voie à Choisey, aux lieux-dits Les Champins/L’Ormoy.

 

 

2. Cadre naturel

 

Le territoire communal se trouve à l’extrême nord du Finage, à quelques kilomètres de Dole. Choisey est ainsi traversé à l’est par le Doubs et quelques méandres aujourd’hui abandonnés. Situé entre la Saône et le Doubs, à la limite de la Bourgogne et de la Franche-Comté, le Finage présente de nombreuses particularités qui en font un terroir comtois original. Entre Saône et Doubs, la géologie du Finage, qui se prolonge en Côte-d’Or et en Saône-et-Loire, est très liée aux deux grandes rivières qui la bordent. Le Doubs, puissant et capricieux a, par ses alluvions, façonné le paysage et le sous-sol. À l’ouest, la Sablonne, affluent de la Saône, draine les terrains. La répartition des sols se fonde sur leur comportement à l’égard de l’eau, à l’ouest les sols sont donc légers. Sous l’effet de la pluie et de la sécheresse, ils se transforment en poudre blanchâtre que pousse le vent : c’est le Finage à sol blanc, qui n’est pas le plus riche. À l’est et au nord-est, en direction du Doubs les sols sont argileux, limoneux et légèrement sablonneux. Lourdes, profondes, sombres, difficiles à travailler ce sont les meilleures terres.

Depuis les communes les plus hautes, Tavaux, Molay, Choisey et Gevry, la vaste plaine nue s’étale vers le sud uniformément : paysage ouvert sans clôture, sans haie, sans talus, sans chemin creux, au climat semi-continental, humide, exposé aux vents d’ouest. L’altitude moyenne de cette micro-région s’élève alors à 200 m.

 

 

3. Etat des connaissances

 

3.1. Sources

Aucun texte antique ne vient faire mention du site aggloméré de Choisey, ni d’autre groupement dans la région du Finage. Seule l’archéologie nous amène alors toutes les preuves d’une importante occupation du Finage et notamment sur les installations en bordure de voie.

 

3.2. Historique des recherches

Cette commune, traversée par l’itinéraire antique dit de la voie d’Agrippa reliant Châlon à Besançon, comporte une occupation relativement riche, toutes périodes confondues. Les découvertes résultent toutefois pour l’essentiel, à l’exception de quelques sites déjà identifiés dès le XIXe siècle, des recherches récentes : analyses des clichés des missions aériennes de l’IGN, prospections aériennes par G. Chouquer ou P. Nowicki, prospections pédestres et opérations archéologiques de sauvetage liées à l’aménagement de l’autoroute A39, de la création du carrefour de Gevry et des zones industrielles et commerciales.

Les premières études archéologiques entreprises au début du XXe siècle, sous l’impulsion de Julien Feuvrier dans la région de Dole et du Finage, ont permis de réaliser un inventaire des découvertes (nécropoles, voies, mottes…) et de proposer des hypothèses d’organisations spatiales (Marquiset 1841-1842 ; Rousset 1853-1858 ; Feuvrier, Vuillermet 1903-1904). Ainsi, des études synthétiques ont été réalisées jusque dans les années 1930, dont est issue par exemple, la synthèse des réseaux viaires qui proposera, entre autre, le rôle primordial de Tavaux comme nœud routier dans le système de communication du Finage, pour la période antique (Feuvrier, Brune 1920). De nouvelles recherches sont entreprises au début des années 1970 par N. Jeannin, puis G. Chouquer (Jeannin 1976 ; Jeannin et alii. 1978 ; Chouquer, de Klijn 1989 ; Chouquer 1993 ; 1994 ; Laurent et alii. 1996). Les hypothèses sont alors réexaminées puis remises en cause. Des études interdisciplinaires (prospections pédestre et aérienne, photo-interprétation…) permettent de proposer ainsi, des modèles d’occupations plus élaborés pour comprendre l’organisation spatiale des implantations humaines, tout en cherchant à appréhender certaines structurations du terroir, depuis la protohistoire.

 

Les implantations humaines les plus anciennes, repérées actuellement dans la basse vallée du Doubs, datées du Mésolithique (9000 – 7000 av. notre ère) sont attestées sur les communes de Gevry et de Choisey (Séara, Ganard 1996 ). Le Néolithique et les Ages du Bronze ancien et moyen sont quant à eux faiblement représentés, essentiellement grâce aux découvertes isolées. La densité des occupations augmente avec le Bronze Final et le 1er Age du Fer. En effet, les prospections aériennes et pédestres (G. Chouquer), ainsi que les grands aménagements et les fouilles réalisées depuis les années 1990 ont permis de percevoir les différentes implantations protohistoriques. À ce titre, nous pouvons citer les opérations de sauvetage réalisées notamment dans le cadre des travaux de l’A39 en 1994 pour les diagnostics (UI n° 1) et en 1996 lors d’une fouille préventive (UI n° 6). Ainsi, dans le secteur de l’Ormoy, a été fouillée une nécropole protohistorique à enclos fossoyés déjà détectée au cours de prospections aériennes par G. Chouquer en 1976 (UI n° 7). À cette occasion, la photographie aérienne a révélé, en bordure nord-ouest de la RN 73, sur une longueur de 150 m environ et une largeur de 60 m, 13 enclos funéraires (diam. de 12 à 25 m) associés à un ensemble de fossés comblés ainsi qu’une voie bordée de deux fossés parallèles (Chouquer 1976-1977). Le décapage partiel de 1996 avait alors permis de reconnaître 13 enclos, définis par des fossés circulaires larges interrompus au sud-ouest et montrant un profil évasé en U. Les analyses C14 semblent dater le comblement de ces ensembles du premier Age du Fer, sans pour autant dater avec précision la période d’utilisation avec précision. Superposée à l’occupation protohistorique dans le secteur Aux Champins, une occupation laténienne (La Tène C2-D1) a également été observée. La période gallo-romaine est, elle, représentée par tout un réseau de structures parcellaires se développant indépendamment des principales orientations observées à l’échelle du Finage (Simonin 1995 ; 1996). Récemment, un nouveau diagnostic réalisé en 2005 aux Champins sur plus de 8 hectares (UI n° 31), a permis de mettre au jour de nouvelles structures protohistoriques avec notamment des traces d’habitats et de nécropoles attribuables au Néolithique et à l’Age du Bronze (Nowicki et alii. 2005).

 

La période antique reste la mieux documentée, grâce aux nombreuses études réalisées depuis un siècle. Cependant, certaines zones sont, apparemment « vides », représentant en fait pour l’essentiel, l’absence de prospections en raison d’un couvert végétal trop dense (forêts). À l’échelle de la commune de Choisey, la découverte de structures gallo-romaines reste quelque chose d’assez rare. Ainsi, la mise au jour d’une petite occupation en bordure de voie lors des fouilles accompagnant l’aménagement du carrefour de Gevry en 1998 (UI n° 3 et 4) est assez inédit, vu l’état de conservation des vestiges (Séara 2001). La découverte la plus importante reste à ce jour la villa de Parthey fouillée en 1994 avant la construction de l’A39 (UI n° 1 et 2). La mise au jour des structures lors des sondages préalables en 1994 a alors directement entraîné un décapage extensif de 8 ha sur l’emprise autoroutière. Outre la villa, cette opération a permis la fouille de multiples vestiges, répartis de l’Age du Bronze Final aux XVIIe-XVIIIe siècles (Vaxelaire, Labeaune 1996). D’autres occupations antiques ont également pu être repérées grâce aux différentes campagnes de prospections aériennes et pédestres organisées par G. Chouquer dans les années 1980 à l’image de sites repérés au lieu-dit les Malargies. Il faut toutefois aujourd’hui nuancer ces résultats. En effet, les opérations de diagnostics réalisées depuis le début des années 2000, notamment dans les zones pavillonnaires et industrielles au sud du village de Choisey, ont démontré que les sites auparavant repérés par prospection pédestre correspondaient finalement qu’à un épandage de mobilier au sol. Ainsi, un site prospecté en 1987 aux Prairierottes (UI n° 11, vestiges gallo-romains constitués de tegulae, de blocs calcaires et de sigillée) n’a révélé aucune structure lors du diagnostic mené en 2003 (UI n° 25 ; Haut 2003). Néanmoins, le contraire s’est aussi déjà produit avec l’existence d’un habitat antique accompagné d’un parcellaire observé par G. Chouquer en 1978 aux Malargies (UI n° 12) qui fût également recoupé lors d’une vaste opération de diagnostic archéologique en 2006 (UI n° 15 ; Violot, Videau 2006). Par conséquent, les nombreux diagnostics menés depuis les années 1990 aux Champins et aux Malargies tout particulièrement ont permis la mise au jour de bâtiments antiques situés en bordure de voie (UI n° 15 ; UI n° 30 : Bierent, Ducreux 1996 ; UI n° 32 : Nowicki 2006).

Parmi l’ensemble de ces recherches, la découverte de structures parcellaires sont très nombreuses souvent accompagnées de petites structures agricoles, annexes des grandes villae telles que celles de Parthey ou de Nébies (UI n° 21, 22). Ces diverses structures prouvent une maîtrise totale du territoire foncier du Finage. Trois orientations majeures de parcellaires sont proposées depuis les années 1970 : NL-16°30’ E, NL-21°30/23°30’ E et NL-30°, 30’ E. Les dernières interprétations font de ces orientations, des éléments qui organisent le paysage. Certains établissements économiquement forts devaient donc jouer un rôle de répartition, d’organisation et de contrôle des terres (Laurent et alii. 1996). Depuis la Préhistoire, l’homme a plus ou moins influer sur l’organisation du Finage. Même si, sa présence et son action n’ont fait qu’augmenter, il a su ou du réutiliser certains éléments antérieurs lorsque cela s’avérait nécessaire à l’exemple de l’implantation de la voie romaine d’Agrippa au début de notre ère.

 

Ainsi, la connaissance du Finage, et notamment du secteur de Choisey, au nord, doit énormément aux recherches archéologiques modernes. Les structures alors découvertes par le biais des prospections pédestres et/ou aériennes depuis les années 1970, ont souvent pu être recoupées par le développement de l’archéologie préventive et la multiplication des diagnostics et des fouilles dans le secteur sud de Choisey. Cette multiplication est alors due au développement économique du sud du dolois avec l’aménagement de zones industrielles, commerciales et pavillonnaires ainsi que la mise en place d’un nouveau réseau routier et autoroutier (A39 et carrefour de Gevry).

 

4. Organisation spatiale

 

            4.1. Voirie

 

Le tracé de la RN 73 et de la RD 973 reprend celui de la voie antique dite d’Agrippa reliant Châlon-sur-Saône à Besançon (UD n° 5). Cette voie a probablement une origine protohistorique comme le laisse par exemple supposer la disposition des enclos funéraires de l’Ormoy et de ceux découverts dans les communes de Tavaux ou de Saint-Vit. Cette voie, ou les fossés la bordant, a pu être repéré à plusieurs reprises lors de différentes opérations archéologiques. Au lieu-dit l’Ormoy, un tronçon de fossé (prof. 1,05 m ; larg. 1,8 m) bordier a été fouillé en 1995 dans le cadre des fouilles précédant la construction de l’A39 (Simonin 1996, p. 86, 164). Ce même fossé a également été repéré lors du diagnostic et de la fouille réalisée en 1997 et 1998 par F. Séara avant l’aménagement du carrefour de Gevry (UI n° 3), malgré l’absence d’observation de cette voie. C’était ici l’occasion d’observer la relation étroite entre voie d’Agrippa, fossé de drainage et habitat. Les investigations précédentes n’avaient permis de l’observer que de façon ponctuelle. Reconnu sur une longueur d’environ 300 m, sa profondeur peut atteindre près de 2 m et sa largeur environ 5 m. Deux grandes phases de comblement peuvent être perçues sur les coupes stratigraphiques réalisées. Une première phase rapide qui semble se produire jusqu’à l’obtention d’un profil d’équilibre du fossé : des éboulements de parois, mais aussi des comblements anthropiques peuvent également être à l’origine de ce premier comblement où on a notamment pu observer une couche épaisse d’une vingtaine de centimètres contenant 67 kg de résidus de forges, essentiellement constitués de scories et de quelques éléments de parois de four. La deuxième phase de comblement du fossé est relativement plus lente mais constitue le comblement définitif de la structure (un apport naturel extérieur). L’étude des coupes stratigraphiques a également permis de définir différentes motivations à l’origine du creusement du fossé : une extraction de matériaux nécessaire à l’établissement de la voie d’Agrippa Châlon-Besançon à l’époque antique, puis un drainage, perceptible par les comblements progressifs et réguliers des dernières phases de remplissage (Séara 2001, p. 37-39).

L’installation de bordure de voie du Carrefour de Gevry se trouve organisée à un petit carrefour entre la voie d’Agrippa et une autre voie, repérée lors de la fouille de 1998. D’orientation nord-est/sud-ouest, perpendiculaire à l’axe principal, celle-ci a été observée sur une longueur d’une cinquantaine de mètres (UD n° 6). Elle présente un état de conservation qui se détériore à mesure que l’on s’éloigne de l’axe repris par la RN 73. Elle se matérialise soit par la présence de la bande de roulement représentée dans sa partie méridionale sur une dizaine de mètres, soit par un niveau compact de gravier lié à l’édification de cette structure. Dans la partie la mieux conservée, sa largeur passe de 6,5 à 4 mètres, tandis que la bande de roulement, de largeur constante, se situe aux environs de 3 m. Cet élargissement pourrait matérialiser la jonction avec la voie principale, nécessitant pour des raisons pratiques un aménagement plus conséquent. La bande de roulement, délimitée de part et d’autre par un alignement de moellons calcaires disposés sur chant, se compose de blocs calcaires calibrés, associés à quelques galets. Ce niveau de chaussée s’accompagne de traces d’ornières dont l’écartement de 1,50 m est standard pour l’époque romaine. Pour terminer, cette structure de circulation est bordée par un aménagement constitué de fragments de tegulae et d’imbrex dont la fonction pourrait être liée à un drainage latéral. Deux phases principales de construction peuvent être individualisées. La première, qui correspond à l’édification primitive, présente une stratification convexe, à partir d’un socle de limon de débordement. La structure est alors directement installée sur le comblement du grand fossé bordier de la voie d’Agrippa. Un premier niveau de gravier est ensuite déposé puis scellé par de petits blocs calcaires (le statumen), auxquels succède une charge de gravier (le rudus), qui aggloméré par de la chaux, constitue un noyau extrêmement résistant. Cette succession caractérise la première phase d’édification malheureusement non datée précisément (début Ier siècle de notre ère). Quant à la seconde phase, elle est matérialisée par la mise en place de la bande de roulement, telle que nous l’avons décrite précédemment. Les fossés de la première phase, reconnus tout au long de la portion de la voie étudiée, sont peu à peu rebouchés. Non reconnu par photographie aérienne, ni même sensible dans la topographie actuelle, il est impossible de définir les liaisons que pouvait assurer ce petit axe de circulation (liaison avec une villa ?). Cet axe confère en tout cas à ce lieu d’implantation une position stratégique de carrefour, probablement à l’origine des aménagements (Séara 2001, p. 51-53).

 

4.2. Le bâti

Les structures bâties mises au jour à Choisey sont assez nombreuses et peuvent prendre des formes très diverses selon leur période de rattachement.

 

            4.2.1. Le bâti laténien

Pour la période laténienne, l’occupation la plus importante se trouve aux Champins (UD n° 8) fouillée en 1996 par O. Simonin (UI n° 6). Superposé à une occupation de l’Age du Bronze final IIIB, l’habitat laténien (LTC2-LTD1) est composé de deux bâtiments sur poteaux associés à trois puits ainsi qu’à un ensemble de greniers. Il s’agit alors là de structures inédites pour cette période dans ce secteur (Simonin 1995 ; 1996).

 

            4.2.2. Les villae antiques

La période gallo-romaine est représentée par un certain nombre de structures bâties liées à des habitats plus ou moins importants. Parmi ceux-ci, nous retrouvons des villae dont deux ont été principalement repérées, celle des Nébies, en bordure du Doubs, puis une autre à Parthey, le long de la rivière de la Blaine. La villa des Nébies reste finalement très peu connue (UD n° 14). Elle est seulement repérée par photographie aérienne (Chouquer 1986, p. 75) et prospection pédestre (Staniaszek, Card, Croizat 1987-1988, p. 40) grâce à quelques éléments de constructions visibles. Ces derniers, répartis sur plusieurs hectares, sont attribuables à une villa dont les bâtiments sont organisés autour d’une cour carrée principale probablement bordée d’un péristyle.

La villa de Parthey est, quant à elle, beaucoup mieux connue puisqu’elle a fait l’objet d’une importante fouille en 1994 (UD n° 1). Installée sur un substrat protohistorique (Age du Bronze et Hallstatt), cette villa se développera du Ier au IIIe siècle de notre ère sur un rebord de plateau surplombant la vallée du Doubs. Malgré le mauvais état de conservation des vestiges, le bâti a pu être fouillé sur une surface de plus d’1 ha et se poursuit au-delà de l’emprise autoroutière, à l’ouest. Cet établissement a ainsi connu plusieurs états d’occupation.

Cet habitat pourrait être structuré par rapport à une voie antique observée sur une longueur de 32 m qui est rattachée à l’état 3 (UD n° 2). Orientée est-ouest, elle suit le même axe que le bâtiment C et borde la limite nord de l’établissement rural. Cette voie devait mener à l’est à un franchissement de la Blaine et au-delà vers la voie Châlon/Besançon via une voie repérée par G. Chouquer aux Sablonnières (UD n° 10). Elle a probablement perduré après l’abandon du site gallo-romain dans la mesure où elle semble structurer et peut-être conditionner l’occupation du haut Moyen-Age. En effet, la fouille a aussi mis au jour une importante occupation du Moyen-Age se développant de part et d’autre de l’axe de circulation antique (UD n° 3 et 4). Ainsi, au nord de la voie, se trouve un ensemble de maisons en matériaux périssables, dont il ne subsiste que des trous de poteaux et des fonds de fosses ; le plan de six bâtiments a été identifié. La datation repose sur la découverte de céramique du Val de Saône et une analyse C14. La fourchette obtenue situe une partie de ces vestiges entre la fin du VIIIe siècle et la fin du IXe siècle (Vaxelaire, Labeaune 1996).

La présence de cet important établissement rural antique, ou même de celui des Nébies, pose la question d’un lien entre ces sites et la petite installation de bordure de voie repérée au Carrefour de Gevry.

 

                        4.2.3. L’habitat de bordure de voie (UD 7)

La présence d’une petite installation en bordure de voie à Choisey aux Champins/Carrefour de Gevry est aujourd’hui attestée grâce à une fouille réalisée en 1998 par F. Séara. Cette occupation a été repérée sur une surface d’environ 1 000 m² et est caractérisée par une implantation, en partie superposée au fossé bordier de la voie comblé, par des aménagements de sol, une voie, des puits et quelques structures excavées (UD n° 7). Les contraintes techniques liées à la présence de la RN (talus, fossé, espace de sécurité…) font que la zone fouillée fut réduite. Toutefois, l’absence de vestiges, en dehors de la bande de révélation, ne s’explique pas, malgré l’existence de conservation différentielle, par l’impact de phénomènes d’érosion. Si cette dernière, sensible, est exclusivement mécanique, elle n’a affecté que les vestiges de surface. Il est probable que si des structures excavées avaient été présentes, une partie aurait été conservée. Ainsi, en l’état actuel des données, il est difficile de préciser la nature de cette occupation. Plusieurs hypothèses pourront être proposées, en ayant à l’esprit, qu’à aucun moment, pour des raisons techniques (talus de route, réseaux…) un lien direct entre la voie principale et les structures d’habitat n’a pu être mis en évidence. Une des principales caractéristiques de cette occupation est d’avoir livré un nombre assez limité de structures correspondant à 2 puits, 2 fosses domestiques, 6 trous de poteaux, un foyer et un caniveau, en plus des nombreux niveaux de sols. Au regard de cet inventaire, nous pouvons nous interroger sur l’importance de l’érosion des structures. Au contraire, il pourrait paraître évident que nous sommes confrontés à une occupation dont la nature n’a pas impliqué l’édification de structures nombreuses et variées. Pour cette raison, la quantité et la qualité du mobilier recueilli, en particulier des fibules, paraissent tout à fait remarquables.

 

            4.3. Nécropole.

À 1,5 km au sud-ouest de la zone d’habitat fouillée au Carrefour de Gevry se trouve une nécropole dont les structures sont datables du Haut-Empire (début Ier-milieu IIe siècle). Celle-ci se trouve sur la bordure occidentale de la voie d’Agrippa. Localisée sur la commune de Tavaux au lieu-dit Les Charmes d’Amont, cette nécropole est souvent appelée Tavaux I dans la littérature (Barbet, Joan, Ancel 2014).

Sur le territoire de Choisey une nécropole du Bas-Empire a été identifiée et en partie fouillée en 1964-1965 aux Malargies (nord-est du Carrefour de Gevry). 15 tombes à inhumations ont été mises au jour, datables de la seconde moitié du IVe siècle (UD n° 11). Elles ont toutes livré du mobilier, étudié par L. Joan : il comprend notamment de la céramique (céramique commune majoritaire : cruches, vase ovoïde, coupes, coupelle, écuelle, rebord de mortier ; céramique commune à dépressions : 1 vase et 1 gobelet à dépressions décoré à la molette ; paroi fine : 2 gobelets à 1 gobelet décoré ; céramique avec décor à la barbotine : 1 vase ovoïde), de la verrerie (miettes de verre ; un fragment de verre conique type Isings 106 ; un fond de verre conique type Isings 109 ou Morin-Jean 109 ; un flacon en verre type Isings 120b ; un fond de récipient en verre type Isings 106b ; un gobelet en verre type Isings 96), des bijoux (bracelets, perles en pâte de verre, pendentif, fragment de bague, 1 fibule à queue de paon type Feugère 19) et des monnaies dont une monnaie de Constantin (type Cohen, t. VI, p. 232, n° 136). Certaines sépultures ont livré des offrandes alimentaires ; dans une tombe d’enfant, le squelette d’un coq était placé entre deux vases (Jeannin et alii 1978, p. 294, n° 51 ; Joan 1997, p. 53-61).

Nous retrouvons également une nécropole pour la période médiévale. Celle-ci est située à Parthey, à proximité de la villa du Haut-Empire fouillée en 1994 (UD n° 3). La nécropole composée de 9 sépultures repérées se développe à environ 10 m au sud de la petite voie. Les sépultures sont toutes orientées est-ouest, tête à l’ouest. Le matériel archéologique permet d’attribuer la nécropole à l’horizon Iva de la chronologie de Böhner, à savoir la première moitié du VIIe siècle (Vaxelaire, Labeaune 1996).

 

4.4. Etendue supposée et remarques

En raison de l’état de conservation des structures et des aménagements modernes à proximité, aucune relation directe n’a pu être faite entre l’habitat et la voie d’Agrippa. De plus, seul le côté occidental de la voie a été investigué. Nous ne savons donc pas si cet ensemble possède un parallèle sur le côté oriental. Par conséquent, les limites de cette installation de bordure de voie ne nous sont pas connues. Ces structures n’ont été repérées que sur une longueur de 75 mètres pour une largeur de 20 m. Il s’agit donc là d’un ensemble assez atypique et inédit pour la région, seul exemple de petit habitat de bordure de voie.

 

 

5. Nature et caractérisation de l’occupation

 

5.1. Artisanat

Aucune activité artisanale n’a pu être mise en évidence au sein de la petite installation de bordure de voie du Carrefour de Gevry (UD n° 7). Toutefois, parmi le mobilier découvert, quelques indices pourraient nous permettre de lier une certaine fonction commerciale à ce petit groupement de bordure de voie.

 

Céramique : Ainsi, au sein de la vaisselle commune, on peut remarquer quelques anomalies. Si les céramiques communes claires, à engobe micacé et à gros dégraissant correspondent bien aux ensembles du IIème siècle, en revanche, la présence des Terra Nigra et de certaines formes de commune sombre fine pose problème. Si on compare avec les sites urbains à Besançon : fouilles du Lycée Condé ou du Refuge, on constate qu’à partir du début du IIème siècle, la Terra Nigra, en nette régression, est résiduelle ou inexistante. Il en est de même pour la plupart des sites en Gaule. Ici la quantité de récipients est trop importante pour expliquer le phénomène par la simple résidualité. Ceci incite à s’interroger sur la nature du dépôt d’où proviennent la plupart des vases, est-elle homogène, ou pourrait-elle correspondre à des niveaux différents ? Cette singularité est-elle liée à une activité commerciale du site ? Il existe à Vienne (Isère) une boutique datée de la période claudienne, dans laquelle une quantité importante de vases précoces sont proposés à la vente au même titre que d’autres récipients plus récents (Godard 1992, p. 247). L’effectif élevé de formes de même type, tels que les coupes Drag. 37, les écuelles à collerette, les cruches type 1D, utilisées pour la consommation des aliments ou des liquides, peut également témoigner en faveur d’une fonction commerciale. Toutefois, les autres catégories, notamment les céramiques culinaires, sont bien représentées. On remarque que beaucoup de vases appartiennent à des formes qui sont reprises d’une catégorie de céramique à une autre. Par exemple les écuelles à collerette ou les pots carénés existent en Terra Nigra, commune sombre fine et commune claire. Il semble que cette particularité s’observe également à Tavaux (Sandoz 1994, p. 40).

 

Le mobilier métallique : Une des particularités des niveaux gallo-romains, est la quantité et la qualité des vestiges domestiques en métal mis au jour La majorité du mobilier recueilli provient du secteur situé à l’est du puits st 3. 22 des 29 fibules, 6 lames de couteaux 5 petits anneaux en bronze et 34 objets ou fragments en fer ou en bronze ont été mis au jour sur une surface de 70 m². La quantité et la qualité du mobilier de cette nature, nous ont poussé à envisager une vocation particulière de l’occupation à l’origine de tels dépôts. Nous nous sommes orientés vers la piste de dépôts votifs, mais malgré le nombre important de vestiges, ils ne présentent aucun caractère votif (les fibules sont toutes cassées, des radiographies pour tenter de lire des inscriptions votives ont été réalisées sur les lames de couteaux). Le type de structuration n’évoque en rien l’existence d’un petit sanctuaire. L’accumulation et la quantité en un même lieu caractérisent davantage une occupation intensive et répétée, telles qu’une auberge ou un petit relais routier.

La série des fibules est à ce jour la plus importante recueillie dans le Finage et constitue dès à présent une série de référence. 11 couteaux ont également mis au jour dans le même espace, sur une surface très réduite de 10 m². Deux catégories ont pu être distinguées. Les exemplaires à soie, possèdent une longue soie traversant tout le manche et repliée. Ce type de couteau se caractérise par une lame, très large à la base. La seconde catégorie paraît plus inhabituelle puisqu’il s’agit de couteaux pliants, caractérisés par une lame effilée articulée par un rivet. Le nombre important de cette catégorie d’objets, leur distribution spatiale serrée, nous ont à un moment donné fait penser à des dépôts votifs, raison pour laquelle ils ont été radiographiés afin de décrypter d’éventuelles inscriptions. Cette opération n’a rien livré. Leur présence ne peut s’expliquer que par le résultat d’une utilisation ou par celui de leur perte.

 

5.2. Habitat domestique

En l’absence de réelles structures bâties telles que des murs, il est difficile d’établir un plan de ces structures ainsi que de pouvoir interpréter leur nature. La quantité et la qualité du mobilier collecté lors de la fouille peuvent toutefois nous aider dans ce sens, comme nous l’avons prouvé précédemment avec une possible activité commerciale. Quelques structures permettent toutefois de préciser la nature de l’occupation domestique. Deux fosses de rejets domestiques à l’arrière des structures d’habitats, et à l’ouest de la voie, ont été fouillées. La fonction de ces structures paraît être celle d’un dépotoir comme semble le confirmer, d’une part, la morphologie de la structure, et d’autre part, le caractère hétérogène des vestiges rejetés (mobilier céramique, métalliques, osseux et en verre, moellons calcaires…). Un petit foyer, situé au sein du secteur 4, a aussi été reconnu. De forme quadrangulaire, ses dimensions sont de 80 cm par 80 cm. Il se compose d’une chape d’argile rubéfiée, à laquelle sont intégrés des galets siliceux associés à du gravier et quelques fragments de tegulae. Cette plaque de cuisson, au même titre que les fosses dépotoirs, témoigne d’une activité domestique. Les deux puits participent également à ces activités.

 

 

6. Chronologie et critères de datation

 

Les quelques fouilles et diagnostics réalisés sur la commune de Choisey depuis ces 20 dernières années nous ont permis d’observer divers types d’occupation appartenant à des époques tout à fait différentes. De manière générale, les implantations humaines les plus anciennes repérées actuellement dans le Finage sont datées du Mésolithique (9000 – 7000 av. n.-è.). Celles-ci sont attestées sur les communes de Gevry et de Choisey. Le Néolithique et les Ages du Bronze ancien et moyen sont quant à eux faiblement représentés, essentiellement grâce aux découvertes isolées. Le Bronze ancien est lui présent grâce à de nombreuses structures et notamment avec l’importante nécropole à enclos repérée en photographie aérienne le long de la RN 73, puis fouillée à plusieurs reprises. Ces diverses occupations prouvent que le Finage est une terre riche ayant entraîné très tôt une installation humaine.

 

6.1. La Tène D

Dans la zone étudiée, un seul habitat a pu être identifié appartenant à la transition La Tène C2/D1 (UD n° 8). Celui-ci se situe aux Champins et correspond à une petite zone d’habitats composée de deux bâtiments sur poteaux associés à un ensemble de greniers. Le mobilier céramique lié à cet habitat gaulois se compose de 33% de céramique non tournée et de 63% de céramique tournée, et de 0,4% de céramique peinte (Simonin 1996, p. 143-158).

 

6.2. Le Haut-Empire

On s’aperçoit très vite que la mise en place, dès le début du Ier siècle de notre ère, du tronçon de la voie d’Agrippa reliant Châlon-sur-Saône à Besançon, va entraîner la naissance d’un nouveau type d’habitat. Ce dernier se rapproche ainsi de la voie romaine. Les plus gros établissements ruraux tels que les villas des Nébies ou de Parthey se trouvent quant à eux à l’écart, le long des cours d’eau, du Doubs et de la Blaine. Cette situation nous permet de nous interroger sur le lien existant entre ces deux types d’habitats. Dans ce contexte, au Carrefour de Gevry (UD n° 6 et 7) se développe également dès le Ier siècle de notre ère, un ensemble de structures dont il est difficile de donner une caractérisation précise. Les structures présentes témoignent d’une volonté de s’implanter au plus près de la voie puisque le fossé de celle-ci est comblé afin de permettre l’installation. Toutefois, les aménagements, assez sommaires, sont à mettre en relation avec un type d’implantation dont la vocation est probablement à l’origine de la quantité et de la qualité du mobilier recueilli. Ce petit groupement perdure jusqu’à la fin du IIIe siècle, de même que la villa de Parthey.

 

                        6.2.1. Les céramiques

Le mobilier est majoritairement composé d’ensembles céramiques essentiellement représentés par des amphores, des sigillées, des métallescentes, des Terra Nigra, des communes claires et sombres, ainsi que des céramiques non tournées. Parmi ces catégories, la sigillée est un bon marqueur. Elles représentent 26% des vases et 8% des tessons, le nombre de vases est peut-être ici légèrement surévalué du fait de la forte standardisation de ces céramiques qui facilité la détermination des formes.  Les productions du sud sont bien représentées avec 27 % du nombre de vases de la catégorie (234 tessons, 69 NMI). Quelques formes des années 40 subsistent, Drag. 18, Drag. 22, Drag. 27, Drag. 29, Drag. 30. Les coupes Drag. 37 et les formes des services flaviens Drag. 35/36, Drag. 46, Drag. 51, et assiettes du service E, sont les plus appréciées. Leur fabrication débute en 60 et se poursuit jusqu’au milieu du IIème siècle (Vernhet, Passelac 1993, p. 579). À ceci s’ajoutent un Drag. 38 et 4 exemplaires de Drag. 33, cette dernière forme, absente dans la phase précédente, apparaît ici associée aux services flaviens. Les importations de la Gaule du Centre sont largement dominantes avec 57 % du nombre de vases (503 tessons, 144 NMI). Les productions de la phase 5 du groupe de Lezoux, datées de la première moitié du IIème siècle fournissent l’essentiel du répertoire. Les produits des phases 6 et 7, milieu IIème et début IIIème sont plus rares. L’effectif des Drag. 37 est exceptionnellement élevé (74 exemplaires), les coupes Lezoux 42/43 et 44/ très fréquentes (25 exemplaires), apparaissent surtout vers 120. Les autres formes Drag. 27, 30, 31, 33, 35, 38 et Lezoux 21, 24, 31, 48 se répartissent de façon plus disparate. Certaines productions ne possèdent pas les critères permettant de les attribuer aux ateliers du sud ou de Lezoux. Elles proviennent de Bourgogne ou de l’Est, nous les avons regroupées dans la catégorie Centre/Est (43 tessons, 20 NMI). Il s’agit de formes Drag. 33, Drag. 36, Drag. 37, Drag. 42, Drag. 46, et Curle 23. Les coupes Drag. 33 et 46, d’après l’aspect de la pâte, semblent provenir de l’atelier régional de Luxeuil.

 

6.3. Le Bas-Empire

La période du Bas-Empire n’est pas représentée au sein du petit regroupement du Carrefour de Gevry, puisque le site est abandonné, de même que les villas de Parthey et des Nébies dès la fin du IIIe siècle. Néanmoins, cette partie du Finage dolois n’est pas complètement délaissée au Bas-Empire. On peut ainsi observer un certain déplacement de l’occupation, plus au nord, vers le village actuel de Choisey, toujours le long de l’axe de la voie d’Agrippa. Plusieurs bâtiments ont alors été repérés lors de diagnostics.

À l’Ormoy (Choisey, Brasero), une occupation est présente en bordure de voie dès le IIe siècle de notre ère sous forme de puits et de fosses (UD n° 15). Une structure d’habitat ne sera présente qu’aux IVe et Ve siècles sous la forme d’un petit bâtiment. Faute de fouille extensive de cet ensemble, la caractérisation de cette occupation reste à ce jour inconnue (Nowicki 2006, p. 29).

Il en est de même des deux bâtiments datés du IVe siècle détectés aux Malargies (UD n° 12 et 13). Néanmoins, cette petite occupation pourrait être associée à une nécropole fouillée en 1964-1965 (UD n° 11), datée également du IVe siècle d’après les études de mobilier effectuées par L. Joan (1997, p. 53-61).

 

6.5. Le haut Moyen-Age

Le haut Moyen-Age, lui, est exclusivement représenté à travers la présence d’un petit habitat associé à une nécropole succédant à l’occupation de la villa de Parthey (UD n° 3 et 4). La fouille de 1994 a mis au jour 9 sépultures, à environ 10 m de la voie antique. Sur celles-ci, 5 ont livré du matériel : 5 plaques-boucles en fer (3 du type C-Bülach ; 1 de type B ; 1 incomplète), 3 d’entre elles comportent du décor damasquiné ; 2 gobelets burgondes à panse carénée et col haut ; 2 couteaux ; 1 scramasaxe ; 1 pince à épiler ; quelques éléments de fourreau ; 1 monnaie romaine en bronze illisible. Le matériel archéologique permet d’attribuer la nécropole à l’horizon Iva de la chronologie de Böhner, à savoir la première moitié du VIIe siècle (Vaxelaire, Labeaune 1996, p. 209-219, 234-238).

Au sud de la voie, à une dizaine de mètres à l’ouest de la nécropole, une structure de type « fond de cabane » a été découverte ; « une banquette d’environ 30 cm de large, constituée de blocs calcaires irréguliers, mêlés à de rares inclusions de tubulures, est aménagée à l’intérieur du creusement ». Ces structures ont livré du mobilier métallique lame de ciseaux à bois en fer, mordant de ceinture en fer, fiche à bélière, poinçon ?, plaque de four munie d’un rivet en bronze, 2 clous en fer) quelques fragments de céramique du type Val de Saône (type Sevrey) et des charbons de bois. L’analyse C14 des charbons de bois donne une datation de ces structures entre 645 et 780 ap. J.-C (Vaxelaire, Labeaune 1996, p. 208, 223, 225-226, 233).

À environ 100 m au nord de la nécropole, ont été repérés deux bâtiments sur poteaux qui pourraient été datés du début du VIIe siècle : l’un de 130 m² (F17), « présente un plan quadrangulaire avec galeries sur les quatre côtés d’une cellule centrale », le second (F57) comporte un plan incomplet s’apparentant au précédent. L’analyse des charbons provenant du trou de poteau du second bâtiment (F57) fournit une fourchette chronologique comprise entre 360 cal AD et 600 cal AD. Par ailleurs, des tessons du type Val de Saône, recueillis dans le bâtiment (F17), fournissent pour leur part un terminus post quem fixé au début du VIIe siècle (Vaxelaire, Labeaune 1996, p. 205-223).

Au nord de la voie se trouve un ensemble de maisons en matériaux périssables, dont il ne subsiste que des trous de poteaux et des fonds de fosses ; le plan de six bâtiments a été identifié. La datation repose sur la découverte de céramique du Val de Saône et une analyse C14. La fourchette obtenue situe une partie de ces vestiges entre la fin du VIIIe siècle et la fin du IXe siècle (Vaxelaire, Labeaune 1996, p. 203-208).

 

 

7. Synthèse sur la dynamique d’occupation

 

Hormis la villa de Parthey, l’occupation gallo-romaine la plus importante fouillée sur le territoire de Choisey correspond à la petite installation de bordure de voie au carrefour de Gevry. Située sur le côté occidental de la voie d’Agrippa reliant Châlon à Besançon, ce petit groupement est matérialisé par une série d’aménagements de sol, réalisés sur le sommet du comblement du fossé daté du début Ier siècle. Ils témoignent d’une volonté de s’implanter au plus près de la voie. Les aménagements, assez sommaires, sont à mettre en relation avec un type d’implantation dont la vocation est probablement à l’origine de la quantité et de la qualité du mobilier recueilli. Selon l’auteur de la fouille F. Séara (2001, p. 87) « l’hypothèse d’un habitat est, au vu du faible niveau de structuration, à proscrire malgré un assemblage de mobilier compatible avec ce cas de figure : assemblage céramique à caractère domestique, objets métalliques divers, verre, faune… Une vocation cultuelle nous paraît devoir être également écartée, en raison de l’absence de structures spécifiques (fanum) et du caractère hétérogène du mobilier ». À ce jour, l’hypothèse privilégiée concernerait l’existence d’une aire, plus ou moins aménagée, adjacente à la voie, liée à l’arrêt et au ravitaillement des hommes et attelages. Ce caractère est évoqué par la présence des puits, par la quantité importante de vaisselle cassée, témoin d’une intense fréquentation, par la présence de nombreux couteaux dont plusieurs exemplaires pliants, par la présence de faune et de nombreuses fibules perdues (ardillons cassés tordus). Il semble qu’il faille chercher une explication simple à cette occupation liée à des passages répétés sans qu’ils nécessitent d’aménagements conséquents. L’idée d’une aire annexe à la route, destinée au ravitaillement, repos… nous paraît être la plus plausible. Les éléments de comparaison sont quasi inexistants et seule la mention d’une fouille récente réalisée sur les communes de Berchères-Saint-Germain et de Poisvilliers en Eure-et-Loir, constitue un point de rapprochement significatif (l’Archéologue, n° 49). Dans le cas du Carrefour de Gevry, à Choisey, les bâtiments sont au moins au nombre de deux, édifiés grâce à des matériaux périssables en terre et bois sur des solins. Nous pourrions donc être ici en présence d’une petite agglomération de bordure de voie assez atypique, et peu commune dans la région, dont la vocation serait exclusivement liée à une halte ou une auberge modeste en relation directe avec la présence de la voie d’Agrippa. Fréquentée du Ier au IIIe siècle, cette petite occupation pourrait également avoir un lien avec les nombreux établissements ruraux présents dans la vallée du Doubs, non loin de la voie romaine d’Agrippa qui la traverse.

 

 

8. Perspectives de recherche

 

Au vu de l’urbanisation moderne et des aménagements dans le secteur du carrefour de Gevry, il n’y a plus aucune possibilité d’intervenir sur le site afin d’obtenir de nouvelles informations sur la nature de l’occupation. Les recherches à mener à l’avenir vont concerner davantage les points de comparaison avec l’installation de bordure de voie de Gevry. Celle-ci est un cas unique, dans l’état actuel des recherches sur l’axe viaire Châlon-Besançon. En effet, cette agglomération pourrait être, dans l’état actuel des recherches, la seule « agglomération antique » avérée sur cet axe entre l’agglomération de Pontoux et celle supposée à Dole. La multiplication des recherches archéologiques le long de la RN 73 entre Dole et Tavaux a aujourd’hui permis d’en connaître davantage sur l’occupation humaine du Finage. L’habitat groupé reste toutefois une structure assez rare, voire inexistante, à ce jour. L’exemple de Choisey est-il beaucoup plus fréquent qu’on ne le croit sur ce tronçon de la voie d’Agrippa ? Dans ce contexte, il ne faut pas non plus nier l’importance des établissements ruraux de type villa.

 

 

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Loïc Gaëtan

Illustrations Choisey