Saint-Amour (Jura)

1. Localisation et emprise connue de l’occupation

 

Au pied du massif jurassien, sur la bordure orientale de la Bresse se trouve le village de Saint-Amour (39). Sur le territoire communal se trouvent quelques vestiges appartenant à une occupation protohistorique, puis romaine, sans savoir pour autant s’il s’agit véritablement d’un habitat groupé. Le village de Saint-Amour est alors essentiellement connu pour son histoire médiévale, avec la fondation de l’abbaye par Gontran Ier, petit-fils de Clovis, roi de Bourgogne, en 585. Les reliques de Saint-Amour firent alors la renommée du village. Située sur l’antique voie de Lyon à Besançon, Saint-Amour apparaît comme une ville frontière entre les régions Bourgogne, Franche-Comté et Rhône-Alpes. Déjà à la période antique, la ville se trouve à l’extrême sud de la cité Séquane, non loin des Ambarres. Les découvertes réalisées sous le bourg de Saint-Amour se composent essentiellement de monnaies protohistoriques et romaines. Les indices démontrant l’existence d’une agglomération antique ici même restent ainsi assez ténus. De ce fait l’emprise de cette occupation est totalement inconnue.

 

 

2. Cadre naturel

 

Saint-Amour se développe à l’extrême sud-ouest de la région Franche-Comté, sur les premières pentes du massif jurassien, tout en débordant sur la plaine bressane toute proche. Le village est installé au confluent de deux sources, dont une correspond au ruisseau du Besançon, petit affluent indirect de la Seille, par le Solnan, à Louhans. Le bourg se trouve à une altitude moyenne de 240 m.

 

 

3. Etat des connaissances

 

Les principales découvertes sous le bourg actuel de Saint-Amour ont lieu durant tout le XIXe siècle, lors de travaux urbains. Ces découvertes sont toutes fortuites et n’entraîneront jamais de recherches plus approfondies sur le terrain. Aucune fouille n’a alors été réalisée, et les trouvailles font seulement l’objet de quelques notices reprises par  Petitjean en 1994 dans L’étude d’un pays comtois : la Petite Montagne. Les monnaies sont les objets les plus couramment mis au jour à Saint-Amour, qu’elles soient laténiennes ou romaines (UI n° 1 ; 5 à 8 ; 9, hors carte ; 11 ; 13). Les localisations restent également malheureusement très imprécises. Une seule structure bâtie a été découverte rue du Châtelet (UI n° 2). Elle se présente sous la forme d’un mur traversant la rue et auquel était associé des tessons de céramiques ainsi qu’une monnaie de Faustine II (Petitjean 1994, p. 78). En 1995, C. Méloche réalise une synthèse documentaire sur l’ensemble des découvertes réalisées jusqu’alors. Depuis, aucune opération archéologique n’a eu lieu, hormis aux Prés Girard en 1999 par P. Nowicki (UI n° 12). Situé en périphérie éloignée du village, le diagnostic s’est révélé entièrement négatif.

Les auteurs du XIXe siècle ont voulu voir dans le hameau de Vaucenans, situé à environ 2 km au nord-est du centre-ville, l’origine antique de Saint-Amour. Cette assertion trouve son fondement dans le texte des chartes de 930 : « In pago lugdensi, burgum et ecclesiam Sanctorum Amoris et Viatoris cum ville Vincius prepositura… ». Le terme de villa désigne plutôt un établissement rural (Méloche 1995, p. 11).

En 585, Gontran, petit-fils de Clovis, roi de Bourgogne, fit édifier à Vincennes-la-Jolie, qui n’était alors qu’une bourgade dans un territoire appartenant aux évêques de Mâcon puis à Albéric de Narbonne, une église destinée à abriter les reliques de Saint Amator et Saint Viator : soldats chrétiens de la légion thébaine massacrés à Saint-Maurice d’Agaune en Valais. La garde des reliques fut confiée à des religieux qui établirent un monastère proche de l’église. Les miracles attribués aux reliques attirèrent rapidement de nombreux pèlerins dans la bourgade qui se développa autour de son église. Les successeurs de Gontran donnèrent ce fief à l’évêque de Saint-Vincent-de-Mâcon qui fit construire un château et une enceinte pour la défense du bourg, confortant ainsi la position stratégique de la bourgade, située entre le massif jurassien et la plaine bressane, sur la route de Lyon à Strasbourg, par Besançon. Le village prit au fil des siècles le nom de Saint-Amour.

L’ensemble de ces découvertes démontre alors la présence d’un site au cœur du bourg de Saint-Amour. Ces mentions de découvertes restent néanmoins malheureusement trop anciennes et trop peu précises pour établir un plan de l’occupation de ce secteur.

 

 

4. Organisation spatiale

 

La mention de découvertes de vestiges antiques sous le bourg de Saint-Amour semble démontrer la présence d’un site à cet endroit. L’extension et la nature même de l’occupation restent toutefois difficiles à préciser dans l’état actuel des recherches. Le site se développe ainsi sur un petit promontoire dominant la vallée du Besançon, au passage de la voie romaine reliant Besançon à Lyon, par le piémont du Jura (UD n° 1). A cet endroit se trouve un carrefour routier avec la voie provenant du massif, par Arinthod et en direction de Louhans (UD n° 2).

Les indices d’une nécropole tardo-antique ou du haut Moyen-Age pourraient être replacés à l’angle des rues du bourg et des Fours banaux (UD n° 6). En 1718, un sarcophage a été découvert à l’intersection des deux rues « c’était une pierre creuse, recouverte d’une autre pierre taillée en dos d’âne ». À proximité, en pleine terre, on a dénombré 5 ou 6 squelettes « à 5 ou 6 pieds de profondeur et distants de l’église paroissiale d’environ 60 à 80 pieds » (Petitjean 1994, p. 78). Cette nécropole pourrait appartenir à la première église paroissiale située à l’angle de la rue Recloisière et rue du Châtelet.

           

 

5. Nature et caractérisation de l’occupation

 

Les seuls indices numismatiques ne peuvent fournir d’indications pour mieux caractériser l’occupation antique du bourg de Saint-Amour. Les différentes découvertes restent alors pour la plupart non caractérisées, faute de données supplémentaires. Seule la présence d’un mur associé à du mobilier antique, rue du Châtelet (UD n° 5), permet de situer une possible structure d’habitat dans ce secteur.

 

 

6. Chronologie et critères de datation

 

En l’absence de fouilles d’ampleur et de découvertes récentes, il est très difficile d’établir une chronologie d’occupation du site de Saint-Amour.

 

6.1. La Tène

Parmi les découvertes effectuées (Jeunot 2000, p. 23), quelques-unes correspondent à des monnaies gauloises aux types grec et romain telles que :

– la découverte d’une monnaie en argent, non loin de la gare (UD n° 8), appartenant au peuple Séquane à la légende Sequanoiotuos (LT XVI, BN 5351).

– dans un jardin, près du Champ de Foire (UD n° 9), un potin gaulois (LT 8351).

– dans la cour de M. de Nanx, dans le bourg (UD n° 10), une monnaie gauloise, en bronze, à légende : Turonos / Cantorix (LT XXVII, BN 7005) ; et une autre à légende KALETEDV (LT XXXII, BN 8291).

Malgré une incertitude sur la nature de l’occupation à cette période, la découverte de ces monnaies prouve que le carrefour de voie est déjà occupé à la fin de la période laténienne.

 

6.2. Haut-Empire

Là aussi, les découvertes monétaires nous indiquent une occupation antique du Haut-Empire sous le village actuel. Parmi les monnaies, nous retrouvons une monnaie de Faustine II, rue du Châtelet (UD n° 5), et d’autres non localisées, découvertes dans le bourg (UD n° 10) : 1 as de Germanicus, 1 denier d’Auguste, 1 as de Tibère, 1 sesterce de Galba, 1 as d’Antonin et 1 petit bronze de Valentinien Ier.

 

6.3. Bas-Empire

L’occupation de l’agglomération au Bas-Empire n’est absolument pas connue. Seule la présence d’une monnaie de Constance II, vers l’église actuelle (UD n° 7), apparaît comme un indice. Les sarcophages et sépultures découverts rue du Bourg (UD n° 6) sont d’autres indices qui pourraient tout aussi bien appartenir au haut Moyen-Age, faute de mobilier associé.

 

 

7. Synthèse sur la dynamique d’occupation

 

Le dossier documentaire archéologique de Saint-Amour reste trop actuellement trop ancien pour pouvoir préciser davantage la nature d’occupation des différents vestiges mobiliers mis au jour sous le bourg actuel. La période laténienne n’a livré du mobilier que dans l’immédiate périphérie du secteur urbanisé. Cependant que ce soit l’emplacement du Champ de Foire ou celui de la gare, il apparaît que ce sont les axes routiers qui sont déjà occupés, marquant la pérennité de ce carrefour. Les découvertes de mobilier pour la période antique restent tout aussi laconiques. Elles couvrent les périodes du Haut et Bas-Empire. Mais le mobilier est pour la plupart non restituable, et localisé avec peu de précision. Malheureusement, il n’est pas possible de préciser la nature de cette occupation, située au carrefour routier, sur le passage à gué de la voie Lyon-Besançon sur la rivière, en l’absence de recherches modernes telles que des sondages.

 

L’étude du site de Saint-Amour est ainsi assez complexe vu l’état actuel des recherches. Le faible dossier documentaire ne permet pas d’avancer davantage d’hypothèses quant à la nature réelle de l’occupation.

 

 

8. Perspectives de recherche

 

Il paraît maintenant difficile, voire impossible d’en savoir plus sur l’organisation spatiale et la caractérisation de l’occupation du site antique de Saint-Amour du fait du recouvrement urbain entre l’occupation antique et le village médiéval.

 

 

9. Bibliographie

 

Billoin 2004 : BILLOIN (D.) – Saint-Amour (39) « Les Charbonnières » Rapport de diagnostic archéologique, SRA Franche-Comté, Besançon, 2004, 10 p.

 

Jeunot 2000 : JEUNOT (L.) – Les monnaies gauloises issues de fouilles et prospections entre Saône et Rhin, Mémoire de DEA, Université de Franche-Comté, Besançon, 2000, 217 p.

 

Méloche 1995 : MELOCHE (C.) – Carte Archéologique Urbaine, Saint-Amour (Jura), SRA Franche-Comté, Besançon, 1995, 58 p.

 

Nowicki 1999 : NOWICKI (P.) – Saint-Amour (39), Les Prés Girard, SRA Franche-Comté, Besançon, 1999, 8 p.

 

Petitjean 1994 : PETITJEAN (M.) – La petite montagne dans l’Antiquité : les cantons d’Arinthod ; d’Orgelet ; de Saint-Amour et de Saint-Julien de la fin de l’époque gauloise à celle du haut Moyen-Age, Inventaire archéologique raisonné (gallo-romain et haut Moyen-Age). In : Collectif – Etude d’un pays comtois : la Petite Montagne, Centre Universitaire d’Etudes Régionales, n° 10, 1994, p. 55-90.

 

Rollier 2011 : ROLLIER (G.) – Recherches archéologiques sur les parcelles AH 40, 75 et 78, SRA Franche-Comté, Besançon, 2011, 45 p.

 

Rothé 2001 : ROTHE (M.-P.) – Saint-Amour, Carte Archéologique de la Gaule : Le Jura 39, Académie des Inscriptions et des Belles Lettres, Paris, 2001, p. 612-614.

Loïc Gaëtan

Illustrations Saint Amour