Romain (Jura)

1. Localisation et emprise connue de l’occupation

 

Commune du Jura, limitrophe au département du Doubs, Romain possède sur son territoire un ensemble de vestiges antiques assez conséquents appartenant à plusieurs occupations rurales. Parmi ces vestiges, les prospections aériennes de Gérard Chouquer en 1983 et 1984 ont révélé une probable petite agglomération antique dont la nature exacte reste encore à préciser. Cette dernière se développe au sud de la commune, au lieu-dit Champvounans, à la lisière du village de Louvatange, sur une surface pouvant avoisiner les 2 hectares.

 

 

2. Cadre naturel

 

Le site de Champvounans se trouve à une altitude moyenne de 265 m, dans des parcelles aujourd’hui situées en grande partie en prairie d’où les difficultés de la détection. La commune de Romain, situé au nord du département du Jura, appartient encore au Pays dolois, dans un territoire fertile même s’il reste légèrement accidenté. Le site est également situé dans la vallée de l’Arne, rivière prenant sa naissance à environ 1 km au nord. La présence de minerai de fer est très répandue dans la région.

 

 

3. Etat des connaissances

 

Quelques découvertes sont à noter sur le territoire de Romain au XIXe siècle, rapportées par A. Rousset dans son Dictionnaire géographique, historique et statistique des communes de Franche-Comté et des hameaux qui en dépendent classés par département ; département du Jura (1853-1858, 5 [1857], p. 455). Il signale ainsi déjà les sites de Champ Bourre ou encore de la Chapelle. Il faudra attendre de nouvelles prospections de M. Demésy dans les années 1960-1070, puis d’H. Laurent à la fin des années 1980 pour connaître davantage l’environnement archéologique des deux villages de Romain et de Vigearde, fusionnés en 1825. Les résultats des prospections d’H. Laurent sont publiés dans sa thèse sur Le travail du fer par le procédé direct dans le nord de la Franche-Comté (Doubs, Haute-Saône et Territoire de Belfort, Jura : cantons de Dampierre et Gendrey) (1997). Elles auront permis la découverte d’un certain nombre de sites d’établissements ruraux antiques à La Molle Terre (UI n° 1), à Ourcey (UI n° 2), à la Goulotte (UI n° 3) ou encore à Champ Bourre (UI n° 6). D’autres sites comme au lieu-dit la Chapelle, ont aussi fait l’objet de ce type de prospection afin de compléter les données déjà collectées par A. Rousset au XIXe siècle. Dès cette époque ce lieu-dit Château Fillod ou Foillod est signalé comme étant l’emplacement d’un château qui « disparut tout à coup dans un abîme. Une flaque d’eau recouvre en effet son emplacement » (Rousset 1853-1858, 5 |1857], p. 455). De nombreuses substructions antiques ainsi que du mobilier divers et varié a été mis au jour lors de ces prospections, attestant l’ancienneté du lieu.

Parallèlement aux prospections pédestres, Gérard Chouquer a réalisé deux campagnes de prospections aériennes dans la région en 1983 et 1984. Elles auront permis la découverte d’un important site antique au lieu-dit Champvounans (UI n° 7 et 8). Ce dernier est d’abord interprété comme un établissement rural de type villa. Il pourrait toutefois très bien s’agir d’une petite agglomération antique d’après le plan de l’ensemble des bâtiments visibles sur les clichés aériens. La détection de ce site reste néanmoins très compliquée du fait de sa situation en prairies. Les prospections au sol restent également restreintes. De nouvelles campagnes de prospections au sol ont été réalisées sur le territoire communal au cours des années 2000 grâce à Patrick Mosca. Il aura permis de préciser une nouvelle fois l’étendue des sites déjà repérés depuis les prospections de M. Demésy et H. Laurent, mais également de collecter du mobilier afin de préciser les périodes d’occupation. Le site de Champvounans a alors été repéré au sol sur une faible surface (UI n° 9 ; Mosca 2006). Le reste des prospections s’est essentiellement concentré sur un site au nord de la commune, aux Fombois, Vigearde (UI n° 11 et 12). Il s’agit là certainement du plus important établissement rural présent sur la commune.

 

4. Organisation spatiale

 

La présence d’une grande occupation d’époque antique au sud du bourg de Romain, au lieu-dit Champvounans, est signalée depuis le XIXe siècle. Ils ont fait l’objet, plus récemment, de quelques prospections pédestres de vérification et surtout de clichés aériens de G. Chouquer (Rothé 2001, p. 605). Les vestiges, s’ils sont tous antiques, ne révèlent pas un plan classique d’établissement rural mais une juxtaposition d’unités de petite taille dont le plan reste difficile à établir avec précision. Ce secteur est par ailleurs traversé par la voie dite d’Agrippa de Besançon à Langres, plus précisément celle, à profil militaire, passant par Dammartin-Marpain, Pontailler-sur-Saône et Mirebeau-sur-Bèze. Même si son tracé entre Saint-Vit et Taxenne/Ougney pose encore de réelles difficultés sur le terrain, il est possible que nous soyons ici face à une petite agglomération de type routière.

5. Nature et caractérisation de l’occupation

 

Ni le plan, ni le mobilier ne permettent de mieux caractériser l’occupation de Champvounans. Les parcelles situées à l’est du site présentent toutefois de fortes concentrations de scories de fer, en bordure de l’actuelle forêt (UD n° 7). Mais aucune trace de mobilier ne permet de dater ces ferriers arasés.

Cependant, la présence de vestiges à La Chapelle (UD n° 4) pose des difficultés d’interprétation. Les prospections réalisées durant les années 1980 par M. Demésy, puis par H. Laurent, ont permis la découverte, au milieu de déchets d’activité métallurgique, de deux appliques en bronze (représentant la même tête féminine avec des traces de grènetis circulaires), la moitié d’une sphère de bronze et de monnaies gauloises et romaines (1 monnaie d’argent au « cavalier de la vallée du Rhône », 5 potins séquanes, 1 bronze peut-être gaulois, 2 deniers (républicains) de César, 1/2 monnaie peut-être frappée à Vienne, 1/2 as de Nîmes au crocodile, 1 Claude, 3 Néron, 1 Vespasien, 1 Trajan, 1 denier d’Hadrien au R/Germania émis en 120 ap., 10 moyens et petits bronzes illisibles). La quantité relativement importante de monnaies recueillies en prospection, la faible superficie du site, mais également le lieu-dit La Chapelle constituent autant d’indices qui incitent à penser que nous sommes en présence d’un temple.

 

 

6. Chronologie et critères de datation

 

Aucune étude de mobilier issu de ce site n’a été réalisée. Ses origines et sa période de fréquentation restent ainsi aujourd’hui inconnues.

 

 

7. Synthèse sur la dynamique d’occupation

 

Malgré quelques campagnes de prospections pédestre et aérienne, le site antique de Champvounans reste très mal connu. Ce déficit de connaissance est un frein à la caractérisation de l’occupation. Les clichés aériens restent également trop centrés pour pouvoir géoréférencer les vestiges et en établir un plan actualisé. Le seul disponible est ainsi publié dans la CAG 39 (Rothé 2001, p. 605, fig. 407). L’ensemble des structures visibles, disséminées sur une grande surface n’adopte pas de plan régulier que l’on pourrait attribuer à une villa. Les différentes unités de petite taille doivent davantage correspondre à un habitat au sein d’une agglomération de modeste taille. Cette interprétation peut être renforcée par le fait que nous nous situons ici à égale distance entre l’agglomération de type routière de Dammartin-Marpain et celle de Saint-Vit. La voie militaire d’Agrippa reliant Langres à Besançon, via Mirebeau, n’est malheureusement pas reconnue sur le terrain dans cette zone. Malheureusement aucun indice de mobilier ne permet à ce jour d’établir une trajectoire d’occupation de ce site.

 

 

8. Perspectives de recherche

 

L’inaccessibilité des terrains empêche toute prospection au sol. Le site est en effet en grande partie recouvert par des prairies. La prospection aérienne semble également inadaptée à la détection des vestiges dans la région. Une prospection géophysique pourrait alors nous aider à confirmer ou infirmer ce site dans la catégorie des agglomérations antiques.

 

 

9. Bibliographie

 

Chouquer 1983 : CHOUQUER (G.) – Rapport de prospection aérienne, SRA Franche-Comté, Besançon, 1983, n. p.

 

Chouquer 1984 : CHOUQUER (G.) – Rapport de prospection aérienne, SRA Franche-Comté, Besançon, 1984, n. p.

 

Laurent 1997 : LAURENT (H.) – Le travail du fer par le procédé direct dans le nord de la Franche-Comté (Doubs, Haute-Saône et Territoire de Belfort, Jura : cantons de Dampierre et Gendrey), Thèse de Doctorat, Université de Franche-Comté, Besançon, 1997, 5 vol.

 

Mosca 2006 : MOSCA (P.) – Rapport de prospections au sol. Cantons de Boussières, Audeux (25), Dampierre, Gendrey (39), Amance (70), SRA Franche-Comté, Besançon, 2006, 136 p.

 

Rothé 2001 : ROTHE (M.-P.) – Romain, Carte Archéologique de la Gaule : Le Jura 39, Académie des Inscriptions et des Belles-Lettres, Paris, 2001, p. 604-605.

 

Rousset 1853-1858 : ROUSSET (A.) – Dictionnaire géographique, historique et statistique des communes de Franche-Comté et des hameaux qui en dépendent classés par département ; département du Jura, Bintot impr., Besançon, 1853-1858, 6 vol.

Loïc Gaëtan

Illustrations Romain